Dimanche des malades
A l'occasion du dimanche des malades, les évêques et abbés territoiriaux de Suisse nous adressent leur message.
MESSAGE DES ÉVÊQUES ET ABBÉS TERRITORIAUX DE SUISSE
pour le dimanche des malades
2 mars 2025
Aider à s'aider soi-même
Lors de la "Journée suisse des malades", célébrée traditionnellement en Suisse le premier dimanche de mars, les personnes malades, âgées ou handicapées sont au centre de l'attention – et avec elles tous les soignants et soignantes, médecins et thérapeutes qui contribuent à leur guérison et à leur bien-être. Nous leur rendons hommage pour les responsabilités qu'ils assument dans leur travail quotidien.
"Guérir, retrouver la santé" est le but de tout art médical. Mais la vie impose des limites à toutes les possibilités médicales, aussi grandioses soient-elles. Chaque phase de la vie a déjà ses propres défis et est liée à un nouveau départ et à une nouvelle orientation. Qu'en est-il de notre "guérison" lorsque le diagnostic médical est "incurable" ? Comment réagissons-nous à un accident qui contrecarre tous nos projets d'avenir ? Nous sommes tributaires de nos semblables qui partagent de tels défis. C'est pourquoi, à l'occasion de la Journée suisse des malades, nous pensons aussi à tous les proches, amis et connaissances qui, souvent sans le savoir et dans la sphère privée, assurent l'accompagnement et les soins avec une grande fidélité.
L'Eglise catholique célèbre cette année une année jubilaire : une "Année sainte". Elle nous invite à devenir des "pèlerins et pèlerines de l'espérance". La Parole de Dieu nous accompagne dans cette démarche et nous donne, par l'intermédiaire de saint Paul, un message très encourageant : "et l'espérance ne déçoit pas" (Rm 5,5), elle nous rend même forts dans la détresse. Ce sont des paroles réconfortantes. Mais comment pouvons-nous rester forts lorsque nous sommes frappés par des maladies graves et invalidantes ? Ou comment y parvenir lorsque nous voyons, en plus de notre propre souffrance, celle de ceux et celles qui nous aiment et qui se sentent impuissants malgré toute leur proximité ? Dans de telles situations, nous ressentons le besoin d'un soutien plus grand que nous : Nous avons besoin de l'aide de Dieu, de sa force et de sa présence tangible. Jésus envoie ses disciples (cf. Lc 10, 1-9) et les charge de dire aux malades : "Le royaume de Dieu est proche de vous". Cela signifie qu'il veut qu'ils aident à reconnaître même la maladie douloureuse comme une occasion de rencontre avec le Seigneur. La promesse des disciples aide l'homme malade à découvrir dans la foi une force qui le soutient même à travers ce qui est difficile, à travers la souffrance. Les disciples envoyés de Jésus deviennent les messagers de cette espérance qui se fonde sur la croix et la résurrection de Jésus. Elle est l'ancre qui, par-delà la souffrance et la mort, promet la vie en plénitude.
Notre journée suisse des malades est placée sous la devise "Aider à s'aider soi-même".
Comment pouvons-nous, en tant que "pèlerins de l'espoir", devenir des accompagnateurs et des accompagnatrices de personnes malades pour les aider à se prendre en charge ?
Chaque maladie, en particulier chaque maladie grave ou atteinte durable, même le dernier chemin vers la mort peut être comme un départ. Un départ qui m'oblige à laisser derrière moi ce qui m'est familier et à accepter ce qui n'est pas habituel, voire souvent non désiré.
L'"aide à l'entraide" consiste alors à accompagner une personne sur ce chemin. Cela signifie accompagner le processus souvent douloureux du lâcher prise en écoutant, en discutant avec lui et en lui témoignant de l'affection. Je peux essayer de prendre en considération ce qui aide à améliorer la qualité de vie et finalement à renforcer l'espérance chrétienne d'une vie à la présence de Dieu.
Tant d'images et de paraboles nous ont été données, dans lesquelles Dieu est décrit comme voulant notre vie, une vie en abondance. Regarder l'action miséricordieuse de Dieu nous aide à être miséricordieux envers notre propre vie. Nous ne devons pas mériter ou acheter l'amour de Dieu en nous sacrifiant. Ce qui importe à Jésus, c'est que nous, les humains, fassions l'expérience de la bonté de Dieu. Il veut que nous soyons bons envers nous-mêmes. Dans la maladie, chaque attention portée aux autres renforce la confiance en la présence et la fidélité de Dieu.
"Aider à s'aider soi-même" est donc aussi une aide à l'acceptation de soi et à la réconciliation avec soi-même. S'accepter soi-même, c'est aussi voir ce qui en moi est malheureux, solitaire, abandonné, en échec, tout ce que je préférerais ne pas voir.
Un regard réconcilié sur son propre passé soulage et libère. Et peut-être qu'une prière qui sommeille dans le cœur peut ressurgir et donner de l'assurance dans la maladie. Je pense par exemple à la prière de Saint-Nicolas de Flüe :
Mon Seigneur et mon Dieu,
prends-moi tout ce qui m’éloigne de Toi ;
donne-moi tout ce qui me rapproche de Toi ;
détache-moi de moi-même pour me donner tout à Toi.
Aider à s'aider soi-même pourrait être un tel moyen de s'ouvrir, avec tout son bagage de vie, à Dieu qui compatit avec nous et qui a un cœur pour nous. Afin que nous puissions vivre.
Fribourg et Saint-Gall, le 2 mars 2025
Au nom de la Conférence des évêques suisses
+Markus Büchel, évêque de Saint-Gall